Des plans de relance pour l’emploi, pas pour les actionnaires ! Préservons les activités, les emplois et les savoir-faire à SKF !

Déclaration du comité régional Bourgogne – Franche-Comté du PCF 

L’argent public coule à flots dans les «plans de relance», du moins dans les annonces : 100 milliards d’euros pour la France, 750 milliards d’euros pour l’Europe, 435 millions d’euros pour le Plan régional d’accélération des Investissements (PAI) en Bourgogne Franche-Comté. Et pourtant, les destructions d’activités, d’emplois, de compétences humaines se succèdent dans notre région. General Electric à Belfort, SKF à Avallon et Lons le Saulnier… Tels qu’ils sont conçus et appliqués, les plans de relance non seulement n’endigueront pas la vague du chômage, mais ils accompagnent et facilitent les stratégies de restructuration des grandes entreprises.  

SKF, c’est un groupe à capitaux suédois présent dans 130 pays, avec 40 000 salariés dont 3 000 en France. Avec ses produits de roulement de roue, ses produits moteur, de transmission, de direction et transmission, ses outils de lubrification, SKF et ses 20 000 références peuvent équiper et réparer quasiment tous les véhicules du monde entier. En France, les différents sites qui se répartissent dans cinq plates-formes de compétences, regroupent l’intégralité des activités du groupe. De plus, les sites de Saint-Cyr sur Loire, Valence, Valenciennes sont dotés des laboratoires les plus performants qui contrôlent et valident les matières, les traitements et les composants.  

Or, SKF, sous l’argument d’une baisse d’activité liée à l’aéronautique, se lance dans une vaste restructuration, avec la fermeture prévue de deux sites en Allemagne, 600 emplois supprimés en Suède, et les annonces pour la France : fermeture du site d’Avallon (Yonne), 140 emplois, suppression de 123 emplois à Lons le Saulnier (Jura) sur 350, et 99 suppressions à Saint-Cyr sur Loire (Indre-et-Loire), avec la maigre compensation de quelques transferts d’activités.  

L’effet d’aubaine
pour des destructions inacceptable  

Personne ne nie la réduction d’activités dans l’aéronautique. Sauf que :  

-l’État a mis 7 milliards sur la table pour ce secteur, où vont-ils ?  

-SKF est fournisseur de tous les secteurs motorisés, pas seulement aéronautique,  

-le site d’Avallon travaille aussi pour les tunneliers et le secteur militaire qui ne sont pas touchés par la réduction de chiffre d’affaires.  

-la délocalisation des bureaux d’études et de la recherche-développement vers la Chine, la vente des machines-outils montrent qu’il s’agit d’une orientation stratégique qui ne surgit pas de la situation actuelle.  

Avec les aides publiques, suédoises (100 millions de couronnes suédoises soit 10 millions d’euros) comme françaises, SKF a les reins suffisamment solides pour préserver l’emploi. En fait, comme dans d’autres groupes, les actionnaires profitent de la crise pour restructurer, regrouper, recentrer l’activité sur les secteurs les plus juteux et remonter la « marge opérationnelle », c’est à dire la rentabilité du capital, qui à SKF est loin d’être en effondrement puisqu’elle dépasse même au troisième trimestre 2020 les objectifs à moyen terme du groupe.  

De l’irréparable
pour les êtres humains
et les territoires  

Pour les actionnaires mondialisés, sites et emplois sont des pions, à déplacer ou supprimer à l’aune du cours de l’action ou de son rendement. Dans la vraie vie, à Avallon, ville de 15 000 habitants dans une zone rurale, la suppression d’un site industriel de 140 emplois directs et 200 emplois indirects en fait une ville morte, désertifie les alentours, lui enlève toute attractivité. Que valent les beaux discours des dirigeants sur le nécessaire équilibre des territoires quand on laisse le capital accomplir ses prédations ? Que valent les prétendues recherches d’un repreneur, pour un site qui n’aurait plus les liens d’activité et de recherche avec les autres sites du groupe ? À Lons le Saulnier, perdre 123 emplois sur un effectif de 350, au-delà des vies bouleversées, ce sont aussi des savoir-faire en mécanique, en produits composites et en ingénierie industrielle irrémédiablement perdus. Peut-on prétendre à la réindustrialisation du pays et laisser s’anéantir tant de compétences humaines ?  

Les « plans de relance » : 
de l’argent… pour le capital,
pas pour l’emploi !  

« France relance », la structure qui gère le plan de relance national, vient de retenir le site SKF Lons le Saulnier dans l’appel à projet du fonds de modernisation pour l’aéronautique. La députée LAREM du Jura, Danièle Brulebois, ose remercier la direction de SKF – en plein PSE ! ! ! pour cette sélection… qu’elle ne manque pas d’associer également à l’efficacité de son soutien. En réalité, il s’agit de financer l’automatisation et la digitalisation de la production de ferrures en composite, de roulements et rotules. Rien pour préserver l’emploi, qui peut même, dans la logique capitaliste de tels investissements, s’en trouver encore réduit ! Du côté de la région Bourgogne Franche-Comté, le plan dit d’accélération des Investissements (PAI) se situe aussi dans une logique qui privilégie l’investissement à l’emploi, comme si « l’investissement d’aujourd’hui faisait les emplois de demain » ! Sur les 435 millions d’engagement financier régional, 10 millions seulement sont dédiés à la formation professionnelle. L’essentiel va à l’investissement, réparti au gré des projets déposés par les entreprises et sélectionnés dans le cadre d’un co-pilotage préfet/région. Certes, des objectifs d’emplois, de sécurisation des parcours professionnels, de transition écologique ont été formalisés dans une charte quadripartite (État, région, syndicats, patronat) pour accompagner la mise en place du PAI, mais :  

  1. les déclarations d’engagement des entreprises restent peu exigeantes, puisque l’entreprise doit renseigner obligatoirement une fiche sur les conditions et organisations du travail, mais peut ensuite choisir de ne s’engager que sur un seul des quatre domaines suivants : soutien à l’économie régionaleemplois et compétencesinclusion et solidarité, et transition écologique. Les entreprises pourront donc percevoir des aides, réduire l’emploi tout en remplissant les critères d’éco-conditionnalité imposés. Il y a donc un écart, pour ne pas dire un abîme, entre l’ambition sur l’emploi et la sécurisation des parcours de la charte et sa mise en œuvre dans les déclarations individuelles des entreprises.  
  2. L‘avis du CSE (Comité Social et Économique) n’est que consultatif. Le patronat a bataillé contre l’avis « conforme », du niveau local au niveau national, puisque Geoffroy Roux de Bézieux, le patron du Medef, dans les Échos du 30 septembre 2020, énonçait sans détour : « le privilège de la décision doit rester au conseil d’administration »…  
  3. Les syndicats de salariés sont certes inclus dans une commission quadripartite pour assurer le suivi des aides, mais ils ne participent ni à leur sélection en amont, ni à la définition des orientations de la politique économique régionale.  

Changer de logique pour sortir de l’impasse !  

C’est par le développement de l’emploi, de la formation et des compétences humaines, dans des parcours professionnels sécurisés, que l’on peut espérer transformer et créer les activités productives adaptées aux besoins sociaux et écologiques locaux. Il s’agit en effet de faire reculer la toute-puissance des logiques financières qui, à l’opposé des besoins, précarisent, détruisent emplois et savoir-faire, et désertifient certains territoires.  

Nous proposons de mettre en place immédiatement une conférence régionale permanente sur l’emploi, la formation et la transformation écologique des productions, associant toutes les forces vives : syndicats, entreprises, élus pour :  

  • contrer les destructions en cours, étudier les contre-projets des syndicats et des CSE,  
  • déterminer et quantifier démocratiquement les besoins régionaux en activités, emplois, formations à partir des exigences des territoires,  
  • avancer sur des expérimentations de sécurité emploi-formation, en commençant par les jeunes et les chômeurs,  
  • faire appel à un fonds financier régional qui puisse, à partir des aides publiques, mobiliser dans un effet de levier les crédits bancaire et les profits des entreprises versés aux actionnaires. C’est la question politique majeure d’une maîtrise collective sur l’utilisation de l’argent.  

Pour SKF, nous exigeons en région de Bourgogne – Franche-Comté :  

  • un moratoire suspensif sur la fermeture du site d’Avallon,  
  • l’examen des contre-propositions des salariés et leur intégration dans le schéma régional de développement économique,  
  • une conditionnalité stricte sur le maintien des emplois à Lons-le-Saulnier associée au financement des investissements par France Relance.  

Aides publiques, crédit bancaire, ou profit des entreprises, il s’agit de « notre » argent, sous forme d’impôts, de dépôts, ou le fruit de notre travail. Reprendre collectivement et démocratiquement la main sur l’utilisation de cet argent, faire des choix économiques conformes aux besoins des salariés et des territoires, réaliser les premières expérimentations dans la sécurisation des parcours professionnels, avancer dans une transition écologique maîtrisée, oui, il est possible de commencer à le faire dans nos localités et notre région.  

Portons ces exigences aux élections régionales de juin 2021.