Bonne nouvelle !

Ça y est, la voilà, la nouvelle formule d’Économie&Politique est entre vos mains. Dès sa réception, à la vue de sa couverture au look transformé vous vous êtes sans aucun doute rendu compte que quelque chose avait changé.

Mais pourquoi donc ce besoin de changement ? En marketing, un produit nouveau est celui qui diffère sensiblement, du point de vue de ses caractéristiques ou de l’usage auquel il est destiné, du produit précédent. Mais cela signifie aussi la capacité d’un produit à engendrer un changement sensible du comportement de ceux qui l’adopte.

En fait, dans l’esprit et la réflexion de l’équipe qui a travaillé à ce très important renouvellement de la formule d’Économie&Politique, équipe qu’il faut d’ailleurs largement remercier, il y avait certes un petit peu de tout cela car l’aspect visuel, les questions de formes ne sont pas à négliger. Mais au fond il est question de bien autre chose. L’objectif poursuivi est assez radicalement différent d’une simple opération de toilettage tant il s’agit de faire de nos lecteurs tout autre chose que de simples consommateurs.

Le lancement de la nouvelle formule d’Économie&Politique repose sur un niveau d’ambitions visant dans les conditions d’aujourd’hui à faire du lecteur un acteur de la vie sociale et politique, et en retour que ses expériences de vie, de luttes, viennent nourrir et enrichir la revue. Celle-ci se doit en effet d’être toujours mieux en capacité de répondre aux enjeux de transformations profondes de la société sans lesquelles il ne peut exister de dépassement réussi du système capitaliste.

En ce sens, la revue, son équipe d’animation et de rédaction ont une très grande responsabilité. Tout en améliorant la lisibilité des papiers publiés dans Économie&Politique, il s’agit de répondre toujours plus fidèlement à l’exigence théorique et politique qui caractérise depuis toujours sa ligne éditoriale et qui prend racine dans une sorte de double nature : une revue marxiste d’économie et une revue du PCF.

Dans le moment de crise politique profonde que nous traversons et qui touche tous les corps sociaux vivants, le désir de nouveau qui anime la revue est fondamental. Il est même essentiel pour revivifier le mouvement syndical et politique de gauche. Leur délitement et le recul terrible de leur ancrage parmi le peuple, tient pour une large part à la perte de repères de classe et à l’abandon de tout substrat idéologique révolutionnaire. Et, en grande partie, cette évolution renvoie à l’absence de plus en plus criante de réflexion et de débat contradictoires, résultant d’un rejet de la théorie. Pourtant, sans elle, comment trouver et construire les réponses qui pourront redonner confiance au peuple dans le combat politique et syndical ? Comment envisager de contrer vraiment la dérive droitière, voire ultra-droitière, de la société ? Sans théorie, comment construire une volonté et sans volonté comment se construire un chemin ?

Font éminemment partie de la théorie, et donc de la réflexion politique, les questions économiques. Malheureusement, nombreux sont ceux qui considèrent ces dernières comme de simples questions techniques, indépendantes du politique. Cette forme de pensée est surtout l’apanage des partis et des organisations qui ne veulent surtout pas que d’autres, à l’exception d’une certaine intelligentsia à la solde de l’idéologie dominante, s’occupent des questions concrètes, puissent se saisir des véritables leviers qui permettent d’intervenir sur les choix de gestion, choix qui sont à la base des régimes politiques et des modes de société en vigueur çà et là.

Cette propension est plus embêtante lorsqu’elle atteint des partis de gauche. C’est pourtant ce à quoi nous assistons trop souvent depuis de nombreuses années maintenant. Une importante erreur, car les questions économiques sont hautement politiques. Tout ce qui taraude la société depuis des années : chômage, précarité, casse des services publics, réchauffement climatique… est la conséquence d’orientations politiques déclinées sous forme de décisions économiques ; particulièrement celles touchant à l’argent et à son utilisation, au mode de production des richesses et à leur répartition, aux types de coopérations en Europe et dans le Monde, bref au rôle du capital financier. Comment soutenir l’idée qu’un tel sujet n’est pas politique ? Lénine lui-même pointait déjà ce problème fondamental en écrivant dans le tome 9 de ses œuvres ceci : « le XXe siècle marque le tournant où l’ancien capital fait place au nouveau, où la domination du capital financier se substitue à la domination du capital en général ».

Au printemps 2021, en plein cœur de l’épisode majeur de crise sanitaire, sœur siamoise de la crise économique, avec dorénavant les enjeux considérables de reconstruction qui se posent et qui seront au cœur des campagnes électorales de la présidentielle et des législatives, il va en falloir du travail. Il va en falloir de la réflexion théorique pour permettre d’affiner les contenus des propositions que nous avançons et le projet que nous portons, toutes choses inséparables de choix politiques de sortie de crise.

Comme l’écrivait Frédéric Boccara dans le précédent numéro d’Économie&Politique, il ne va pas falloir hésiterà « aller à la rencontre du nouveau face à la domination du capital ». Notre aptitude à anticiper les conséquences de la crise qui vont frapper durement le peuple va en effet devenir de plus en plus impérative. Les communistes ont pour responsabilité de faire se développer les capacités de résistance, de riposte et de réponse aux effets réactionnaires et régressifs des tentatives de restructurations capitalistes à l’œuvre dans le but d’assurer la pérennité de la domination du capital sur les hommes et la planète en France, en Europe et dans le Monde. Car le camp d’en face ne perd pas de temps pour poursuivre sa révolution conservatrice. Ainsi, derrière un discours qui se veut paternaliste, E Macron poursuit et encourage des réformes fondamentales visant à instaurer un nouvel ordre social en rupture avec celui inspiré du Conseil National de la Résistance. Mise en cause de notre système de protection sociale, casse du régime des retraites par répartition, de l’assurance chômage, restructuration de l’organisation administrative territoriale avec la réforme des 4 D (différenciation, décentralisation, déconcentration, dé-complexification), poursuite de la mise à sac des missions du Ministère des Finances (fusion disparition de la Directe, absorption des missions de recouvrement de la Douane par le DGFIP) mais aussi réforme de la justice et augmentation des pouvoirs de la police portant atteinte aux libertés collectives et individuelles… voilà quelques exemples de ce qui attend les citoyens et citoyennes dans les jours et mois prochains. La cerise sur le gâteau étant la poursuite de la dégradation de l’emploi et l’augmentation de la précarité parmi la jeunesse, tout cela sur fond d’une croissance qui a du mal à redémarrer, -0,1 % au premier trimestre 2021, et surtout quel type de croissance ?

Face à la domination du capital qui casse les vies, broie les salariés et le travail au moment où la révolution informationnelle appelle une intervention de plus en plus créative et libérée, face à une montée inquiétante des conflits internationaux avec des foyers tenaces comme la guerre économique des USA contre la Chine, les manœuvres stratégiques de l’OTAN contre la Russie, face à une Europe qui cherche son second souffle en choisissant la dérive fédéraliste, l’urgence est de porter maintenant le fer contre la domination du capital.

Faire de la politique, proposer une politique socialement efficace, engendrant d’autres rapports entre les hommes, entre les peuples, entre les hommes et la nature, c’est commencer tout de suite par changer les rapports économiques. Cela, dans une cohérence que seuls les communistes portent et dans laquelle s’incarne leur originalité révolutionnaire, une cohérence entre objectifs sociaux de transformation, moyens financiers pour les atteindre et pouvoirs pour décider à la fois des objectifs et de l’utilisation de l’argent. Voilà en quoi économie et politique sont liées, voilà en quoi d’ailleurs cette imbrication est le gage d’une efficacité créative réelle pour qui ambitionne vraiment un changement de système jusqu’à une nouvelle civilisation.

C’est dans cette optique qu’il faut appréhender notre proposition de sécurité d’emploi et de formation qui outre l’abolition progressive du chômage, porte un vrai projet de société où les individus seraient libérés de la contrainte du marché du travail pour un épanouissement de tous les instants. Mais il s’agit aussi de nos propositions pour un essor sans précédent des services publics, pour une politique du crédit et un rôle des banques totalement nouveaux, pour une fiscalité renouvelée dont la capacité distributive serait couplée à une dimension incitative forte, pour de nouvelles coopérations entre les territoires de la République et entre pays et peuples de l’Union Européenne comme avec l’ensemble du Monde, pour une démocratie refondée de l’entreprise à la cité avec de nouveaux droits et de nouveaux pouvoirs d’intervention et de décisions pour chacune et chacun.

A l’éclairage de ces propositions, on mesure la dimension politique fondamentale de la cohérence entre objectifs (sociaux et écologiques), moyens et pouvoirs. Et c’est à ces différents niveaux que s’exprime pleinement l’originalité de la pensée créatrice des communistes au sein du PCF. Une création non pas conçue comme une quelconque satisfaction intellectuelle égocentrée mais bien une pensée créatrice mise au service des masses pour les pousser à s’en emparer dans le débat et dans l’action jusque dans des luttes victorieuses et vers la prise de pouvoir. Une prise de pouvoir authentique, non pas un simple accès aux lieux de pouvoir, mais un pouvoir d’intervention sur les principaux leviers de décisions, sachant qu’aujourd’hui c’est la prise de pouvoir sur l’argent qui est au cœur de l’affrontement de classe entre capital et travail. Il s’agit certes de l’argent de l’État mais surtout de celui des entreprises et des banques, particulièrement de la BCE où des masses considérables sont mises en circulation et peuvent être créées ex nihilo. Puisse la nouvelle formule de notre revue aider à cette prise de conscience, à cette évolution des pratiques politiques. C’est modestement le vœu le plus cher que forme l’équipe qui en a, dans des temps incertains mais oh combien passionnants, la responsabilité.

2 Comments

  1. Eviter les mots en anglais , ou alors mettre la traduction . Beaucoup de travailleurs ne parlent pas cette langue . Merci

  2. Il faut absolument faire sortir de la tête des citoyens , que ce que l’on propose n’a rien à voir avec le  » modèle » soviétique entretenu par les médias .

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  1. Numéro 802-803 (mai-juin 2021) – Économie et politique

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